Parfum de niche: Entre les deux…Serge Lutens !
Y aurait-il des bons crus en parfum aussi ? Si c’est le cas, on peut dire que 2008 est une bonne année pour le cépage
Lutens : deux jus admirables qui m’ont fait chavirer. Deux nouvelles fragrances en tout point opposées qui ouvrent chacune la porte sur un nouvel univers et une nouvelle
histoire… et se complètent merveilleusement… Fidèle à son goût prononcé pour les notes orientales, le parfumeur livre dans le
célèbre flacon cloche un parfum gustatif, que l’on respire mais qui roule sur le palais.
El Attarine ou un nectar olfactif. On pense à la cannelle, on pense à des fruits confits, on se réchauffe au soleil de ce jus lumineux mais qui fait froncer le
sourcil. Quelle est cette pointe inattendue qui joue avec notre odorat, allant et venant subtilement ? Un souvenir de miel et de fleur d’oranger passe, le dessous de la langue réfléchit…Du
sucre, quelque chose qui croque ? Une graine…un goût un peu gras, comme de l’huile de noisette et là : sésame, ouvre toi ! Il se révèle à notre imagination et enveloppe les notes
les plus douces d’un voile suave.
Quelle surprise que de voir notre cher créateur de magie s’intituler dans un flacon ! Avec toujours son ambivalence mystérieuse qui y place le prénom au féminin : « Serge
Noire ». Une claque. Un choc. C’est sec, dense, sombre et apre. Le jus nous maintien dans une transe mystique dans un souvenir d’églises en été. Une odeur d’encens, de cendre à
peine piqué d’une fleur exotique inconnue. Quelque chose de la violette ? Quelque chose du ciel et de la terre en même temps, un spirituel nuage juste animal, et la teinte fumée du bois
brûlé quand la braise est éteinte…La transparence des alcools et de l’éther qui s’évaporent dans un souffle intense mais éphémère.
Le test
La chaleur solaire sur un poignet avec El Attarine et ses notes gourmandes d’orange confite que l’on respire comme on déguste un met sirupeux. C’est doux, c’est suave, ca me caresse et me séduit.
De l’autre côté, une noirceur pinçante qui se mue en une douce mousse fouettée. Vraiment indescriptible. Je le sens, j’y reviens, je n’en fais toujours pas le tour. Moi qui aime l’encens et les notes très crues, je suis emballée.
Pendant ce temps, sur mon poignet gauche, El Attarine s’est transformé en un dessert qui répand son parfum dans l’air, qui sucre tout sur son passage. Le sésame se cache derrière un arbre fruitier et cuit au soleil.
Retour à Serge Noire, le pays dont, définitivement on ne revient pas. Caché dans une brume épaisse, c’est un royaume mystique et mystère qui donne sur la voie lactée.
Le reste n’est que frisson et expérience sensorielle…